Editions Clouseau, rue de Belleville, mercredi 23 janvier - 14h30.
Best : L’histoire du groupe ?
Corinne : Olivier rencontre Violaine dans un concert, qui elle-même rencontre Corinne. Vivi et moi, on commençait à jouer d’un instrument. On s’est branché avec Olive, on a fait un concert, c’est parti comme ça.
Olivier : Ca fait pas un an qu’on existe. Le premier concert, c’était en mai l’année dernière. Moi je faisais de la musique depuis un moment. Je jouais avec Diesel à l’époque. Le groupe a fait un 45 tours mou et blanc. Je voulais faire mes propres chansons.
B : On m’a dit que tu as également joué avec Téléphone ?
O : Non, Téléphone, ce sont de vieux copains. Jean-Louis habitait le même quartier que moi. On était scouts ensemble. On s’est fait viurer des pionniers avant de passer notre promesse. Y’avait aussi Jean-Marc, un mec chez qui on habite. A 14 ans, on avait fait un groupe. Y’avait Max de Diesel, Jean-Louis et moi.
B : Et le groupe s’appelait ?
O : Masturbation. On faisait payer les gens 100 balles pour nous voir répéter. On était rats. Après chacun a fait ses trucs. J’ai habité avec François (Ravard, manager de Téléphone) et Jean-Louis. Téléphone n’existait pas encore. On est parti en Espagne. Les histoires commencent souvent en Espagne. Nous aussi on est parti en vacances en Espagne. On ne se connaissait pas vraiment.
C : On est parti avec un mec ; maintenant c’est notre éclairagiste.
O : On s’est retrouvé dans une petit tapa au bord de la mer. Il faisait gris, il faisait froid.
C : On passait nos journées à jouer au flipper et au billard, et la nuit on allait en boîte.
O : Après ça Pierre (manager de Lili Drop) et plusieurs copains ont décidé de prendre une maison insonorisée, et voilà. Corinne habitait cette maison et on est venu jouer là-bas. Montreuil, ça s’appelait. Au début il y avait un autre mec qui s’appelait Lionel, un pote à Jean-Louis (Téléphone). Il a joué le premier concert avec nous. On s’est demandé si on allait continuer à 4 ou en trio, et comme on était pressé par le temps à cause du concert avec Téléphone à Nice, on a répété et on est resté comme ça.
C : C’est là qu’on s’est rendu compte qu’on pouvait jouer à trois.
Olivier traverse la grande salle en lattis vitrifié. Il revient un étui de guitare à la main. A l’intérieur sa petite Fender Esquire, la même que Bruce Springsteen sur la pochette de « Born to run », avec les nervures de bois apparentes. Olive extirpe un cahier noir. Le song book de Lili Drop. Je parcours ainsi une vingtaine de feuillets noircis d’une écriture menue, étalée comme de la poésie de banc d’école. Olive me fait la faveur d’une récitation : « Speedoux » : Le temps qu’avance dans moi qui pense / J’ai pas l’temps d’regarder / Pas la peine d’y compter / Pas l’temps d’respirer / Non pas la peine d’y penser / Je me prends pour ce que je n’suis pas / Je descelle des tombeaux / Renverse des idoles / Mais qu’est-ce qui m’arrive / Arrête, arrête / Solitaire, étouffé / Plongé dans ma vieillesse (« tu vois c’est pas tous les jours que t’es jeune, y’en a certains où tu te sens vieux ») / Les traits un peu tirés je déflore ma jeunesse / J’ai pas l’temps / j’te fais l’amour en petits morceaux / J’ai envie de crier mon désir ».
B (con) : qu’est-ce que ça veut dire : j’te fais l’amour en petits morceaux (les filles pouffent) ?
O : Ca veut dire… Tu fais toujours l’amour intégralement, j’sais pas, c’est compliqué, ça veut dire pas mal de choses. L’idéal ce serait de coller les bouts.
B : Je suppose que chaque chanson fait partie d’un tout ?
O : Oui c’est la même chose. Un sentiment spécial. Je parle de moi. « Sur ma mob », c’est que je ressentais en mobylette (Olive était coursier). « Banal », c’est simplement quand tu croises un type ordinaire, l’impression que ça te fait. « Le singe », c’est la quête. On est toujours en quête de quelque chose, de quelqu’un. « Paraître » c’est une interprétation du monde où tous les gens sont soit magiciens, soit petits lapins.
V : Tu peux être les deux. Les magiciens ce sont ceux qui tirent les ficelles. Les petits lapins ceux qui sortent du chapeau, les instruments si tu préfères.
B : Que représente la scène pour vous ?
C : Un moment parfait.
O : Tout le monde se donne un rôle. Un groupe c’est ça.
B : Tu récites les textes plus que tu ne les chantes, c’est volontaire ?
O : Non, j’aimerai pouvoir vraiment chanter. Je chante très mal. J’essaye aussi de parler au public des fois, c’est bien, c’est magique. Il suffit que deux mots se rencontrent au bon endroit pour que cela prenne tout de suite une dimension. Un mec comme Higelin, y’a des soirs il est magique, il t’emmène très loin.
B : Est-ce que vous avez une autre activité, un truc substantiel ?
O : Regarder la télé, lire, bouffer, dormir…
B : Vos prochains mouvements ?
O : On part en tournée. On va terminer une maquette au studio d’Auteuil. C’est là que Jacno a enregistré son disque (Rectangle).
B : Vous êtes sous contrat avec Eurodisc ?
O : Oui, pour trois albums, un par an.
B : Quand verrons-nous le premier ?
O : A la primavera.
Propos recueillis par Francis DORDOR